"Multinationales : quelle régulation et quelle transparence pour 2017 ?"
Les associations montpelliéraines, ATTAC, CCFD-Terre Solidaire, OXFAM France, le collectif Ethique sur Etiquette, le collectif Roosevelt et Anticor 34, rassemblées en collectif pour la régulation et la transparence des entreprises, ont donné une conférence de Presse sur le thème : "Multinationales : quelle régulation et quelle transparence pour 2017 ?" le jeudi 12 janvier 2017, à Montpellier.
Les interventions ont porté sur :
– Le devoir de vigilance des multinationales, proposition de loi en France et projet de traité à l’ONU,
– L’évasion fiscale et la transparence (loi Sapin 2, etc…)
– La campagne "Prenons le parti de la solidarité" : mobilisation citoyenne et interpellation des candidats aux élections de 2017 sur des thématiques touchant la solidarité internationale.
Ce qui fait problème, en effet, c’est l’absence de lien automatique de responsabilité juridique entre une entreprise mère et ses filiales et sous-traitants pour leurs agissements coupables, notamment concernant les violations des droits humains et les dommages sanitaires et environnementaux. Il nous faut donc inventer un nouveau droit à l’échelle nationale et internationale qui puisse protéger les populations face à la toute-puissance des multinationales. Et qui garantisse le respect des droits humains au travail. Notre objectif : faire respecter les droits fondamentaux au travail et rendre les entreprises responsables. Cela s’appelle remettre la justice sociale à l’agenda politique et économique mondial.
Les mesures volontaires type RSE (chartes éthiques, codes de conduite), ne suffisent pas, Les Principes directeurs de l’OCDE, la norme ISO 26000 (mise en place en 2010) constituent de bons outils, mais restent sans obligation ni sanction. Les recours judiciaires en réparation des dommages sont longs et incertains, au vu en particulier de l’état souvent calamiteux des systèmes judiciaires dans les pays du Sud. La règlementation (la loi) s’avère donc nécessaire. Au niveau mondial, les textes de référence sont la Déclaration de l’OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail, adoptée en 1998. Il s’agit des droits suivants : liberté d’association et droit de négociation collective ; interdiction du travail forcé ; abolition du travail des enfants ; non-discrimination en matière d’emploi ; à quoi s’ajoutent : la possibilité d’emploi et de rémunération ; le droit à la santé et à la sécurité au travail ; la protection et la sécurité sociales ; le respect d’un salaire minimum ; et le respect de la durée maximale de travail.
En France, la Proposition de loi (PPL) sur le devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre, a été approuvée par l’Assemblée Nationale en novembre 2016. Cette PPL vise à responsabiliser les donneurs d’ordres et les sociétés mères vis-à-vis des atteintes aux droits fondamentaux tout au long de leurs chaînes d’approvisionnement ; elle vise aussi à permettre un recours efficace en justice. En instaurant l’obligation d’un plan de vigilance, cette loi impose aux grandes entreprises implantées en France d’être responsables dans la conduite de leurs affaires, en France comme à l’étranger, pour l’ensemble de leur chaine de valeur.
Concrètement, le texte crée une obligation pour les grandes entreprises de réaliser un plan de vigilance permettant d’identifier et prévenir les risques liés à leurs activités, tout au long de leur chaîne d’approvisionnement. Leur responsabilité pourra également être engagée en cas d’absence de plan, d’insuffisance de celui-ci ou de défaut dans sa mise en œuvre. Cette proposition de loi ne concerne hélas qu’une centaine de grands groupes, avec un effet d’entrainement limité, (le seuil à partir duquel les entreprises sont concernées par le texte est de 5 000 salariés directs). Le montant de l’amende est dorénavant plafonné à 30 millions d’euros (au lieu de 10 initialement) une somme qui reste cependant symbolique au regard du chiffre d’affaires des sociétés qui seront soumises à cette loi (moins de 0,1 % du chiffre d’affaires des sociétés concernées. Surtout, le texte ne comporte aucune disposition forte pour faciliter l’accès à la justice aux victimes de violations de droits humains et de dommages environnementaux causés par des entreprises. C’est aux victimes, aux plaignants d’apporter la preuve du manquement à l’obligation de vigilance, ce qui rend les poursuites nettement plus complexes et aléatoires. Pourtant ce texte, s’il contient des lacunes, constitue un premier pas historique vers une prise en compte des droits humains par les multinationales et contribuerait à prévenir des drames comme ceux de l’effondrement au Bangladesh de l’immeuble du Rana Plaza en 2013.
Ce n’est donc qu’une première étape, et la route est encore longue pour voir les droits humains au travail respectés au niveau mondial.
Publié le 1er mai 2017 par